Premier jour : Montpellier – Sète – Béziers

Quand on commence à stresser, généralement, on continue à stresser pour tout. C’est pas très sélectif, le stress.

Donnez-moi un billet pour n’importe quelle ville lointaine (on oublie le bilan carbone de l’avion un instant, là) et je pars le cœur aussi léger que mon bagage cabine ! Dites-moi que je dois mettre mon vélo dans un TER pour aller à Sète (!!!!) puis pédaler pendant 5 jours dans une région où je vis depuis plus de vingt ans, et c’est panique à bord, à bâbord, et à tribord aussi ! Et pourtant…

9 heures du matin, par une belle matinée ensoleillée.

On l’avait oublié, mais c’est grand, la gare de Montpellier. Entre Élise qui attend dedans mais au premier, Paul et Sandrine qui sont dedans mais au rez-de-chaussée, et moi qui patiente dehors, il nous faudra quelques whatsapp pour parvenir à nous retrouver… sur le quai ! Sans oublier les vélos qui rentrent dans l’ascenseur et celui (le mien!) qui n’y rentre pas ; le poids, inhabituel, du vélo (10 kg de plus chacun, quand même) et les escalators qui sont toujours trop lents ou trop rapides, on constate que nos repères nécessitent une bonne mise à jour. En vélo, le monde ne tourne pas pareil que lorsqu’on marche.

Première bonne surprise : le train arrive, et il est pile-poil à hauteur de quai. Autrement dit il suffit de pousser tranquillement son vélo à l’intérieur, sans avoir besoin d’avoir fait de l’haltérophilie ou d’impliquer les copains pour le hisser. Nickel. Nickel aussi (merci les TER intelligents!) l’espace prévu pour, qui nous évite (comme c’était le cas dans l’ancienne version) d’avoir à mettre nos vélos sur la roue arrière pour les aligner. On entre, on pose son vélo dans l’espace prévu, éventuellement on l’attache avec la sangle, et c’est bon. Signe des temps : il y a déjà plus de vélos que normalement prévu, mais peu de monde dans ce train, et en plus nous n’allons pas loin, bref : le contrôleur nous laisse monter, ça y est, c’est parti.

Sète ici Sète !

Moins d’une demie heure plus tard, tout le monde descend, on arrive voie A, le soleil brille…

Il n’y a qu’un seul mec pour cette première expérience, et il se trouve que c’est lui qui va nous guider les jours qui suivent. Nous voici donc à la queue leu leu derrière lui, traversant cette ville où j’ai en partie grandi, et hop ! Quelques coups de pédales plus tard, à nous la magnifique promenade, surplombant la mer, avec cette délicieuse sensation de vacances et de légèreté. Pour les premiers kilomètres, nous allons emprunter les pistes cyclables au bord de la Méditerranée, puis le long de l’étang, nous perdre entre dunes et roseaux, effluves marines dans le nez, pas une voiture à l’horizon. Juste le bonheur et cet intense sentiment de liberté que procure le vélo.

Le rythme est assez soutenu, mais je pense que nous ne nous en rendons pas compte. L’habitude de pédaler nous fait oublier que nous devrons tenir ce rythme plusieurs jours d’affilée. C’est du moins ce que je me dirai quand je commencerai à fatiguer, après à peine 40 et quelques kilomètres sur du plat, alors que je gère plutôt bien, d’habitude. Mais il y a eu le stress des préparatifs, il y a le poids en plus à trimballer, et surtout : il y a le soleil qui cogne.

Première leçon de ce voyage : ne jamais oublier de mettre la crème solaire. Lorsque l’on pédale, on profite toujours d’une légère brise, très agréable même en temps de grosse chaleur. Du coup on a tendance à oublier qu’en vrai il fait chaud. Moi en tout cas j’ai oublié, oublié la crème solaire sur les bras et les mollets, résultat je vais arriver à Béziers avec un gros coup de soleil sur le bras gauche. Tellement gros que pour la première fois de ma vie, je vais peler quelques jours plus tard.

Vias ou Bali?

Dépaysement et exotisme !

Mais pour l’instant : tout roule. Étape sandwich à Vias, un copain du co-work envoie des photos de Bali, transats, cocktails et cocotiers. Je réponds avec des photos de Vias Plage : transats, cocktails et cocotiers ici aussi, mais pas le même bilan carbone. Petit café en terrasse, et on repart. Pour l’instant, c’est toujours l’impression de vacances qui prédomine, paysages de cartes postales, on enchaîne sur la douceur du Canal du Midi, on roule dans Agde avec ses gros pavés qui font trembloter nos vélos, on traverse des champs entiers d’iris sauvage, pistes cyclables quasiment tout le long de cette première étape, 50 et quelques kilomètres, trois fois rien en vérité…

… n’empêche que la première côte dans Béziers, je la monterai en poussant mon vélo, étonnamment épuisée, ce qui me fait quand même redouter le pire pour la suite. D’autant que la soirée ne laisse rien présager de bon non plus : je n’ai pas d’appétit, ce qui ne m’arrive jamais, je pourrais m’endormir sur place, ce qui est plutôt rare, aussi, je me traîne derrière les copains qui eux ont l’air en pleine forme…

Une fois à l’hôtel je prends du paracétamol, et m’endors comme une souche, à la fois heureuse et inquiète. Demain, c’est notre grosse étape, THE défi qui nous stresse toutes les trois. J’ai beau me dire qu’au pire, je peux rentrer en train, j’angoisse quand même. Car si je cale dès la deuxième étape après une cinquantaine de kilomètres, autant dire adieu à mes projets de vacances en vélo… et prendre l’avion pour Bali !

A suivre : Jour 2 : « Mouline mouline », et autres leçons de vie !https://marieurdiales.com/deuxieme-jour-life-is-what-happens/